Pour cette dernière réunion de la saison 2013-2014, Claude nous a fait découvrir le poète Gaston Puel (qu'il a rencontré et avec lequel il a correspondu) par une lecture - sensible et argumentée - de poèmes tirés de L’âme errante & ses attaches (publié en 1992 et réédite 15 ans plus tard).
« … parce
qu'elle invite à l'oubli de soi la poésie incite au pur oubli. Elle
brûle le mobilier, efface les empreintes, ne garde de l'être que le
lieu, promesse du poème. Ainsi se cristallisent dans la mémoire des
éclats arrachés à l'existence, éclats qui nous déchirèrent. Ainsi plus
durement la poésie nous fait paysan de nos malheurs. Plus durement la
poésie nous fait écharde des malheurs de la terre, de l'avidité des
hommes, de leurs criminelles institutions… »
Gaston Puel est né à Castres en 1924. Son enfance s’est déroulée à
Lavaur où sa grand-mère paternelle l’élève après la mort de sa mère et
le remariage de son père. Sa famille, enrichie par le commerce des œufs
et volailles lors de la Grande Guerre, marquée par le décès au champ
d’honneur d’un fils aîné, sera en partie ruinée par les spéculations
boursières de la grand-mère. Son père et son grand-père qui auraient dû
vivre en rentiers reviennent travailler la terre, la vigne
essentiellement.
A la libération, alors qu’il n’a guère plus de 20 ans, il fait la rencontre de Joë Bousquet, André Breton et René Char avec lesquels il correspond. Dès 1947, il participe aux activités du groupe surréaliste.
Il devra passer une année en sanatorium, à Sainte-Feyre, en raison d’une tuberculose découverte à la fin de la guerre. En 1950, il s’éloigne du surréalisme tout en restant en bon terme avec André Breton.
Après sa maladie, il s’installe définitivement à Veilhes, près de Lavaur. Il y crée son atelier d’imprimerie et fonde en 1961 les éditions de La fenêtre ardente. Il publiera des œuvres de Pierre Albert-Birot, Joë Bousquet, René Char, Pierre-André Benoît, Jean Grenier, Pierre Gabriel, Jean Malrieu et sera à l’origine de « Livres d’artistes » : Arp, Ernst, Miro, Dubuffet, Raoul Ubac, Staritsky… En 1971, il dirige aux U.S.A. deux séminaires à l’Université du Maryland, l’un sur René Char, l’autre sur Claude Simon.
Il est l’auteur d’une trentaine de recueils, mais aussi d’essais dont un ouvrage en 1962 sur Lucien Becker. Il a reçu, en 1958, le prix Artaud, pour « Ce chant entre deux astres », puis en 1967, le Prix Max-Jacob pour « Le cinquième château ».
Il meurt à Veilhes le 4 juin 2013. Gaston
Puel ne fut pas seulement un poète d’exception, il fut aussi selon ses
propres termes « un livreur » comme le rappelle Eric Dazzan dans la
biographie qu’il lui a consacré : « une partie de sa vie a été consacrée
aux livres des autres ».
Hommage à Gaston PUEL
LE SOUFFLE ALORS
NOUVELLEMENT S'EVASE
ROUGE GILET DE BLANCHEUR TOUTE
ET DE CHEMISE OUVERTE
COL MONTE
FRONT EBLOUI D' IMAGES
OU LES MOTS CREUSENT LA LANGUE
JUSQU'AU REGARD QUI LAVE
EMPAN DE LA PEINTURE
O FERMETE PENSIVE
ENTRE LES PAGES DU LIVRE
SOUDAINEMENT AVIVEE
ET
DE COLERES EN MARCHE
LA VIE
AINSI TRADUITE
DE VENT A SON ACALMIE
JUSQU'A L'OSSEMENT DES BRANCHES
TOUR A TOUR QUI
S'ACHARNENT ET SE DENUDENT
SELON LE PAS DE L' AFFRANCHI
JUSQUAU SEUIL D'AMOUR FOU
QUI FERA L'AJOUR
DU LIVRE DES FINS
ALORS LA NUIT SE DEMET
GARDIENNE ETOILEE
DE MEMOIRE A VIF
Claude BARREREJuillet 2013
Lectures musicales de textes de Gaston Puel 30 et 31 mai 2014 à l'église de Veilhes |