13/06/2015

VOYAGE : LE PARC DES GRANDS CAUSSES

Samedi 13 juin 

Colomiers 8h, temps incertain. Malgré un bulletin Météo peu engageant pour la journée, qui s’annonce semblable au temps maussade de la veille et qui aurait bloqué au port n’importe quel marin pêcheur, nous sommes partis vers notre destination héraultaise. Petit déjeuner sur l’aire du Belvédère ; la cité de Carcassonne a fière allure sous un ciel menaçant et chargé de gros nuages noirs. Café chaud et viennoiseries réconfortent ceux qui sont encore endormis et alimentent aussi les conversations. 

Arrivée à Villeneuvette où finalement le temps s’est plutôt mis au beau. Le fronton de la porte de la Manufacture proclame : « Se coucher de bonne heure et se lever le matin, c’est fortune, sagesse et santé. Honneur au Travail », Temps béni ou fournir du travail était la finalité des entreprises ! 
 

Une guide très entourée

La Manufacture est créée en 1670 sur l'initiative privée d’un marchand de Clermont-l'Hérault pour la fabrication de draps fins avec le but avoué de faire la nique aux anglais et aux Hollandais dans le commerce du textile aux pays du Levant et du bassin méditerranéen.
Soutenue par Colbert elle devient Royale et va vivre un véritable essor jusqu’à compter 800 employés (dont 400 vivent sur place). Avec la fin du protectionnisme, les progrès des transports et l’appétit sans fin des grands capitalistes son déclin était programmé. Après le temps glorieux de Louis XIV, la manufacture a abandonné la production qui faisait son renom pour devenir dépendante des commandes publiques (habillement pour les troupes, les ordres religieux, les lycées ou l'équipement des wagons de chemin de fer) très loin des draps de luxe aux vives couleurs de ses origines. Le capitalisme et les lois du commerce mondial ont finalement eu raison de Villeneuvette en 1954. 

La guide passionnée, nous en détaille tout le déroulement, les différents directeurs qui se sont succédés, les constructions, les techniques utilisés (que l’ont retrouve dans la célèbre encyclopédie de Diderot et d’Alembert), les avancées sociales dont les ouvriers ont bénéficié (services collectifs offerts : médecins, sapeurs-pompiers, eau chaude gratuite, instruction scolaire jusqu’à 12 ans) et fait revivre sous nos yeux les 300 ans d’histoire que la manufacture a traversé. J’ai tout oublié des anecdotes à l’exception de celle de Yombo, un jeune Africain d’une douzaine d’années, esclave en fuite ramené à Villeneuvette par Casimir Maistre au cours d’une expédition au Tchad. 
 
  
  
  

Séparation difficile avec notre guide qui tient absolument à nous fournir un ultime détail sur la générosité paternaliste des maîtres de la manufacture ; enfin, la faim qui nous tenaille a su l’apitoyer. Le pique-nique a lieu près de l’entrée ; les murets servant à la fois de sièges et de tables…

Notre prochain rendez-vous se situe au temple de Lérab Ling (qui signifie « sanctuaire de l’activité éveillée ») est le centre de retraite européen du bouddhisme tibétain fondé en 1991 par le Sogyal Rinpoché. 145 ha de bonnes terres caussenardes abandonnées pour l’usage et la tranquillité des moines ; Lerab Ling est reconnu officiellement en 2002 comme congrégation religieuse par Nicolas Sarkozy. Le temple sera inauguré par le 14e dalaï-lama, le 22 août 2008 en la présence de Carla Bruni-Sarkozy et de Bernard Kouchner. Un voyage au Tibet, sans les heures d’avion et les risques géopolitique, exotisme garanti.  

  


  
Une nonne tibétaine répondant au prénom de Colette, nous prend en charge en essayant de nous guider physiquement et spirituellement vers l’entrée du temple en passant par la case boutique et souvenir. Pour mon cas personnel un sommeil réparateur dans la salle de la vidéo m’a bêtement privé des paroles essentielles des maîtres tibétains.
  

Quelques bribes du code tibétain : toujours garder le bouddha à sa droite quand on tourne… Un brin poétique quand même les lama : les fanions claquent au vent et les paroles de bouddha qui y sont inscrites sont portées par la brise vers les cœurs et les âmes des infidèles que nous sommes.
Couleurs vives, voire criardes… L’or est omniprésent sur les statues, impression de richesse contredite quand même par notre guide qui nous assure, avec un vrai talent de bonimenteur, que la feuille d’or revient moins chère sur le long terme qu’un bon coup de peinture…
 

Paysages magnifiques de ce Parc des Grands Causses sous le soleil : prairies étoilées de brebis (le mot « mouton » étant réservé à l’usage exclusif des parisiens béotiens), rochers évoquant des châteaux en ruines ou des chevaliers templiers errant… 
Passage par l’hôtel du Rocher au Caylar ; accueil sympa, logements agréables et confortables.
 
Le cirque de Navacelles, 300 m de canyon résidu d’un combat inégal entre la « Vis » petit torrent au cours fluctuant et le massif calcaire originel issu de millions d’années d’alluvions déposés dans la nuit des temps. Puis un beau jour (il y a 6000 ans) pluies torrentielles, avalanches de rochers, œuvre d’un géant ??? la « Vis » a fait un « tout droit », évitant ainsi un méandre devenu inutile… Le résultat est à couper le souffle… 


 

 Une bonne journée passée ensemble, convives joyeux, repas généreux, et même une spécialité alcoolisée locale, le son de la guitare de notre président ; en bref tous les ingrédients d’une soirée sympa. 


Dimanche 14 juin

Un petit déjeuner studieux pendant lequel Nicole nous a révélé les secrets des Templiers, moment particulièrement intense et pourtant une déception : le trésor n’existerait plus, le fisc de Philippe le Bel puis de Charles IV s’en est occupé (une habitude jamais démentie depuis 700 ans). 

 

L’arrivée à La Couvertoirade sous un ciel si bas… de plus en plus bas jusqu’au déluge. Parapluie et K-way n’y peuvent rien, le seul abri étanche s’avère être les voitures. Mais comme le dit la chanson, après la pluie vient le beau temps…
Et la Commanderie du Larzac nous ouvre ses portes... Déjà bien sensibilisés à cet élément liquide, nous avons prêté une oreille attentive aux propos de Nicole nous expliquant le miracle de l’eau dans un pays de sécheresse. 
 
  
Le souvenir de la légende d’un St Christophe, géant au cœur pur, acceptant de porter sur ses épaules le Christ chargé des péchés du monde : tout un programme. Une église simple, rustique à l’image des premiers sanctuaires de la chrétienté, mais remplie des prières de générations de Caussenards qui avaient trouvé refuge entre ses murailles protectrices ; et le jardin des âmes, dernières demeures des templiers. 

 

Traversée du Larzac, des paysages infinis, collines qui épousent un ciel immense, symbole d’une victoire contre un projet parisien d'extension du camp militaire de La Cavalerie.
Vision éphémère du Pont de Millau à peine entre aperçu.

Le restaurant de la Gare à Saint-Rome-de-Cernon, ouvert ce dimanche 14 juin rien que pour « Les Livres et les Idées », nous accueille avec chaleur et générosité. Peu dérangés par le passage des express et des TGV, nous y passons un moment agréable en compagnie de coquelets, innocentes victimes de nos appétits aiguisés...


 

Intrigués par ce fromage persillé de bleu largement servi par nos hôtes au dessert, nous partîmes en visiter la fabrication dans les célèbres caves de Roquefort sur Soulzon

   

En prélude à la dégustation et à la boutique, nous sommes descendus en pèlerinage (à partir de 50 personnes on peut parler de pèlerinage… ) dans le creux de la montagne pour y vérifier légende de Roquefort : l’humble berger parti à la recherche d’une mystérieuse jeune fille en laissant son repas dans la grotte et qui retrouva, au retour, son caillé de brebis couvert de fines moisissures,
Pour nos esprits cartésiens la vérité a été cependant vite rétablie par notre guide : foin de berger et de bergère ! c’est bien le « penicillium roqueforti » (connu aussi sous le pseudonyme de champignons ascomycètes saprophytes) qui a fait la richesse des artisans fromagers réunis en « Société » depuis 1863.

Une sympathique réunion au café du Jardin dans le village de Saint-Affrique a sonné l’heure de la séparation non sans avoir jeté les bases de notre prochaine saison.

Patrick