06/12/2013

SOIREE MUSICALE

MAURICE RAVEL


Au fil du diaporama, préparé par Léopold et Patrick, retraçant
la vie du compositeur, nous avons écouté des extraits de :

ALBORADA DEL GRACIOSO
Création en 1919
JEUX D'EAU
Dédié à Gabriel Fauré
Création en 1901
CONCERTO EN SOL POUR
PIANO ET ORCHESTRE
Création en 1932
KADDISCH
Deux mélodies hébraïques
Création en 1914
 DAPHNIS ET CHLOE - 1912
LA VALSE - 1920
MA MERE L'OYE
Création en 1910

LE TOMBEAU DE COUPERIN
Création en 1920

L'ENFANT ET LES SORTILEGES
Création en 1925
DON QUICHOTTE A DULCINEE
Création en 1932
BOLERO
Création en 1928


« Je me refuse simplement, mais absolument à confondre la conscience de l’artiste, qui est une chose, avec sa sincérité, qui en est une autre [...]. Cette conscience exige que nous développions en nous le bon ouvrier. Mon objectif est donc la perfection technique. Je puis y tendre sans cesse, puisque je suis assuré de ne jamais l’atteindre. L’important est d’en approcher toujours davantage. L’art, sans doute, a d’autres effets, mais l’artiste, à mon gré, ne doit pas avoir d’autre but. »
Ravel, Esquisse autobiographique, 1928

Saint Jean-de-Luz - 1902
Maurice Ravel est né le 7 mars 1875 à Ciboure. Son père, Joseph Ravel, d'ascendance suisse et savoyarde, était un ingénieur renommé et sa mère, Marie Delouart-Ravel, était basque. En juin 1875, la famille Ravel se fixa définitivement à Paris.

La légende, qui veut que l’influence de l’Espagne sur l’imaginaire musical de Maurice Ravel soit liée à ses origines basques est exagérée, d’autant qu'il ne retourna pas au Pays basque avant l’âge de vingt-cinq ans. En revanche, il revint régulièrement par la suite séjourner à Saint-Jean-de-Luz pour y passer des vacances ou pour travailler.

L’enfance de Ravel fut heureuse. Ses parents, attentionnés et cultivés, surent très tôt éveiller son don musical et encourager ses premiers pas. Le petit Maurice commença l’étude du piano à six ans : « Tout enfant, j’étais sensible à la musique, à toute espèce de musique. Mon père, beaucoup plus instruit dans cet art que ne le sont la plupart des amateurs, sut développer mes goûts et de bonne heure stimuler mon zèle ».

Conservatoire de Paris, vers 1895
Entré au Conservatoire de Paris en 1889, Ravel fut l'élève de Charles de Bériot et se lia d'amitié avec le pianiste espagnol Ricardo Viñes, qui devint son interprète attitré. Enthousiasmé par la musique de Chabrier et de Satie, admirateur de Mozart, Saint-Saëns, Debussy et du groupe des Cinq, influencé par Baudelaire, Poe, Condillac, Villiers de L'Isle-Adam et surtout Mallarmé, Ravel manifesta précocement un caractère affirmé et un esprit musical très indépendant.

En 1897, Ravel entra dans la classe de contrepoint d'André Gedalge, et Gabriel Fauré devint son professeur de composition. Fauré jugea le compositeur avec bienveillance, saluant « un très bon élève, laborieux et ponctuel » et une « nature musicale très éprise de nouveauté, avec une sincérité désarmante ». Les deux artistes devaient se vouer leur vie durant une grande estime réciproque.


Les cinq échecs du compositeur au Prix de Rome (1900, 1901, 1902, 1903, 1905) se dessinèrent sur fond de querelle entre académiques et tenants du modernisme. Éliminé aux épreuves préparatoires en 1900, Ravel n'obtint qu'un Deuxième Second Grand prix en 1901, malgré les éloges de Saint-Saëns auquel le compositeur paraissait « appelé à un sérieux avenir ». 
Dès cette époque s'affirmèrent les traits ravéliens les plus caractéristiques : goût pour les sonorités hispaniques et orientales, pour l’exotisme et le fantastique, perfectionnisme, raffinement mélodique, virtuosité du piano.

À la période féconde qui s’étend de 1901 à 1908 appartiennent notamment le Quatuor à cordes en fa majeur (1902), les mélodies de Shéhérazade sur des poèmes de Tristan Klingsor (1904), les Miroirs et la Sonatine pour piano (1905), l'Introduction et allegro pour harpe (1906), les Histoires naturelles d'après Jules Renard (1906), la Rapsodie espagnole (1908) et son grand chef-d’œuvre pianistique, Gaspard de la nuit (1908), inspiré du recueil éponyme d’Aloysius Bertrand. Ravel dédia la suite pour piano Ma Mère l'Oye (1908) aux enfants De ses amis Ida et Cipa Godebski. Cette œuvre témoigne du goût du musicien, resté célibataire et sans descendance, pour une thématique « enfantine ». 
En avril 1909,  Ravel fit sa première tournée de concerts à l’étranger. Il découvrit qu’il était déjà connu et apprécié outre-Manche.


Il fut en 1910 l’un des fondateurs de la Société musicale indépendante (SMI) créée pour promouvoir la musique contemporaine. Dirigée à ses débuts par Gabriel Fauré, la S.M.I. fut très active jusqu'au milieu des années 1930. Elle donna en première audition un grand nombre des œuvres de Ravel et contribua à faire connaître la musique de la jeune école française et celle de compositeurs d'avant-garde (Ravel y invita le jeune Béla Bartók).

Au début des années 1910, deux œuvres majeures donnèrent à Ravel des difficultés. L'Heure espagnole, sonpremier ouvrage lyrique, écrit sur un livret de Franc-Nohain (créé en 1911). L'opéra fut mal accueilli par le public et la critique. Parallèlement, pour répondre à une commande de Serge de Diaghilev dont les Ballets russes triomphaient à Paris, Ravel composa le ballet Daphnis et Chloé (créé en 1912 avec Vaslav Nijinski dans les rôles titre). Cette symphonie chorégraphique utilise des chœurs sans paroles - une vision de la Grèce antique que Ravel voulait proche de celle des peintres français du XVIIIème. L’argument de l’œuvre fut co-rédigé par Michel Fokine et Ravel.

En 1911, Ravel participa à la création de la Société Chopin. En 1913, homme engagé, Ravel fut au nombre des défenseurs de Stravinski lors de la création tumultueuse du Sacre du printemps à Paris. En 1912, triomphèrent les ballets Ma Mère l'Oye et Adélaïde ou le langage des fleurs, tous deux des orchestrations d'œuvres antérieures. Cette période qui précédait la guerre, Ravel la décrivit plus tard comme la plus heureuse de sa vie. Il habitait alors un appartement de la prestigieuse avenue Carnot, près de la place de l’Étoile. En août 1914, la guerre surprit Ravel en pleine composition de son Trio en la mineur (créé en 1915).

Dès le début du conflit, le compositeur chercha à s'engager dans l'aviation militaire, mais, déjà exempté de service militaire en raison de sa petite taille (1,61 m), il fut refusé pour être « trop léger de deux kilos ». Il réussit néanmoins à se faire engager en mars 1916 comme conducteur d'un camion militaire surnommé Adélaïde et avec lequel il eut un accident près de Verdun. Depuis le front, Ravel fit la démonstration de sa probité artistique en refusant, au risque de voir sa propre musique bannie des concerts, de prendre part à la Ligue nationale pour la défense de la musique française qui entendait faire de la musique un outil de propagande et interdisait la diffusion en France des œuvres allemandes et austro-hongroises.

Dessin de Ravel
Fin 1916, victime d'une dysenterie puis d'une péritonite, Ravel fut opéré puis démobilisé en mars 1917. La nouvelle du décès de sa mère, en janvier 1917, le plongea dans un tourment sans comparaison avec celui causé par la guerre - il ne devait jamais vraiment s’en remettre. Il acheva cette année-là six pièces pour piano regroupées sous le titre du Tombeau de Couperin, suite en forme d'hommage aux maîtres du classicisme français qu’il dédia à des amis tombés au front. Ce fut d'abord, en 1920, la réaction désinvolte à sa promotion au rang de chevalier de la Légion d'honneur : pour une raison qu'il ne précisa jamais, il ne prit même pas la peine de répondre à cette annonce, ce qui lui valut une radiation au Journal officiel.

Ravel et Hélène Jourdan-Morhange
La Valse fut la première œuvre majeure de l’après-guerre. Ce poème symphonique commandé pour le ballet par Serge de Diaghilev fut joué en 1920 en première audition en présence de Stravinski et Poulenc. Ravel y défigurait sciemment la valse viennoise en dépeignant un « tourbillon fantastique et fatal », évocation musicale de l'anéantissement par la guerre de la civilisation européenne incarnées par les valses de Johann Strauss. La Sonate pour violon et violoncelle (1922 - créée par Hélène Jourdan-Morhange), matérialisait le « renoncement au charme harmonique » et la « réaction de plus en plus marquée dans le sens de la mélodie » qui allaient caractériser la plupart des œuvres de Ravel dans les années 1920.

Ravel et Colette se rencontrèrent pour la première fois en 1900 dans un salon musical que fréquentaient également Claude Debussy et Gabriel Fauré. En 1919, Colette s'était vu proposer par Jacques Rouché, alors directeur de l’Opéra de Paris, la collaboration de Ravel pour mettre en musique un poème de sa main, intitulé Divertissement pour ma fille. Ravel n'y travailla vraiment qu'à partir de 1924 pour en tirer une fantaisie lyrique baptisée L'Enfant et les Sortilèges, plus proche de la comédie musicale et du music-hall que de l'opéra. Colette a rapporté avec humour la relation purement professionnelle et distante dans laquelle Ravel la tint au cours de l’élaboration de ce projet.


En 1927, Ravel allait devenir, avec Stravinski, une des personnalités musicales les plus reconnues de son époque. Il acheva cette année-là sa Sonate pour violon et piano (dont le second mouvement est intitulé Blues) et inaugura la salle Pleyel en dirigeant La Valse.

Maurice Ravel au piano à New York
En 1928, Ravel effectua une gigantesque tournée de concerts aux États-Unis et au Canada. Il se produisit comme pianiste, dirigea l’orchestre, prononça des discours sur la musique. Il fréquenta les clubs de jazz de Harlem et se fascina pour les improvisations du jeune George Gershwin. Il fut visionnaire : « Vous, les Américains, prenez le jazz trop à la légère. Vous semblez y voir une musique de peu de valeur, vulgaire, éphémère. Alors qu'à mes yeux, c'est lui qui donnera naissance à la musique nationale des États-Unis. »

De retour en France, Ravel composa en 4 mois son œuvre la plus célèbre, un ballet de caractère espagnol commandé par son amie Ida Rubinstein. Le Boléro fut créé à Paris en novembre 1928 devant un parterre quelque peu stupéfié. Cette œuvre singulière, qui dure plus d’un quart d’heure avec seulement deux thèmes et une ritournelle inlassablement répétés, était considérée par son auteur comme une expérience d’orchestration « dans une direction très spéciale et limitée » ;  Ravel fut vite exaspéré par le succès de cette partition qu’il disait « vide de musique ». 

Le temps d’une tournée triomphale en 1932 en compagnie de la pianiste Marguerite Long, qui diffusa le Concerto en sol dans toute l’Europe, Ravel prit une dernière fois la mesure de sa renommée. De retour en France, il n’avait plus que des projets, notamment un ballet-oratorio, Morgiane, inspiré des Mille et Une Nuits, et un grand opéra, Jeanne d’Arc, d’après le roman éponyme de Joseph Delteil, qui ne devait jamais voir le jour.

1935 - Ravel et Lily Laskine
À partir de l’été 1933, Ravel commença à présenter les signes d’une maladie neurologique qui allait le condamner au silence pour la fin de sa vie. Troubles de l’écriture, de la motricité et du langage en furent les principales manifestations, tandis que son intelligence était parfaitement préservée et qu’il continuait de penser sa musique, sans plus pouvoir écrire ni jouer. On pense qu’un traumatisme crânien consécutif à un accident de taxi en 1932 précipita les choses.

Le public resta longtemps dans l’ignorance de la maladie. Chacune des rares apparitions publiques de Ravel lui valait un triomphe, ce qui rendit d’autant plus douloureuse son inaction. En 1935, sur proposition d’Ida Rubinstein, Ravel entreprit un ultime voyage en Espagne et au Maroc (où il joua du piano non sans difficulté) qui lui apporta un réconfort salutaire, mais vain.

Le musicien se retira définitivement à Montfort-L’amaury. Malgré une affectivité, un jugement et une intelligence intactes il avait de grandes difficultés à parler, s'habiller, se servir correctement des objets de la vie quotidienne. Jusqu’à sa mort, il put compter sur la fidélité et le soutien de ses amis et de sa fidèle gouvernante. Le 19 décembre 1937, malgré les réticences du musicien, le professeur Clovis Vincent tenta à Paris une intervention chirurgicale sur son cerveau dans l'hypothèse d'une atteinte tumorale. Ravel se réveilla un court moment après l’intervention, puis plongea définitivement dans le coma. Il mourut le 28 décembre 1937, à l’âge de 62 ans.